Forum Mettâ Index du Forum Forum Mettâ
Bouddhisme originel
 
 FAQFAQ   RechercherRechercher   Liste des MembresListe des Membres   Groupes d'utilisateursGroupes d'utilisateurs   S'enregistrerS'enregistrer 
 ProfilProfil   Se connecter pour vérifier ses messages privésSe connecter pour vérifier ses messages privés   ConnexionConnexion 

Dukkha

 
Ce forum est verrouillé; vous ne pouvez pas poster, ni répondre, ni éditer les sujets.   Ce sujet est verrouillé; vous ne pouvez pas éditer les messages ou faire de réponses.    Forum Mettâ Index du Forum -> Documentation
Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant  
Auteur Message
tiboug



Inscrit le: 10 Jan 2007
Messages: 2

MessagePosté le: Mer 07 Fév, 2007 15:40    Sujet du message: Dukkha Répondre en citant

Citation:
Il n'y a pas de mot anglais ou français qui rende avec précision toute la profondeur, l'étendue et la subtilité sémantique de ce crucial terme Pali de Dukkha, puique justement la tendance de l'ensemble des enseignements du Bouddha est d'élargir et d'approfondir continuellement notre compréhension de la nature de dukkha ...

http://www.canonpali.org/dukkha.html

Vade-mecum bouddhique, Michel Henri Dufour a écrit:
Dukkha, littéralement « difficile à supporter », fait référence à l'insatisfaction, l'incomplétude, l'imperfection, l'insécurité, implicites dans tous les phénomènes qui, en raison de leur changement perpétuel, sont toujours potentiellement sujets à provoquer la souffrance. Ce concept inclut tout ce qui est désagréable, depuis les souffrances corporelles grossières et la souffrance implicite dans le vieillissement, la maladie et la mort, jusqu'aux sentiments subtils tels qu'être séparé de ce que nous aimons ou associé à ce qui nous déplaît et aux états mentaux plus fins comme la torpeur, l'ennui, l'agitation, etc. Il est souvent traduit, d'une façon réductrice, par « douleur » ou « souffrance », mais ces termes sont loin de le définir parfaitement. Dukkha est en fait le déséquilibre, le malaise éprouvé devant la nature oppressive de tous les facteurs d'existence par suite de leurs continuelles apparitions et disparitions. Il possède de nombreuses connotations selon la base ou selon la source, ainsi que de multiples formes.
Les réactions à dukkha ont pour origine l'incapacité à comprendre et admettre la non-permanence et le caractère impersonnel et non substantiel de tous les phénomènes, éléments constituant (avec dukkha) les « trois caractéristiques » (tilakkhana). C'est cette incapacité à comprendre qui place l'être humain, antérieurement à l'Éveil, dans la même situation que Sisyphe, condamné à répéter de manière compulsive les mêmes actions et les mêmes attitudes mentales néfastes.
À l'instar de tous les principes de base de l'Enseignement bouddhique, l'appréhension intellectuelle pure ne peut l'épuiser, dukkha se situe toujours au-delà, dans une expérimentation de tous les instants.


Citation:
Le bouddha historique et de nombreux sages de l'Inde, constatent simplement que le vivant et dukkha vont ensemble, sont indissociables l'un de l'autre. Dukkha est consubstantiel du vivant.

Dans les suttas bouddhistes, on trouve de nombreux exemples sur ce qu'est dukkha, par exemple il est dit : « quand le nourrisson naît, il pleure », ailleurs il est dit : « quand le cadet paraît, l'aîné en est jaloux ».

Vous voyez, il ne s'agit pas de réduire dukkha à la souffrance, mais de traduire la nature conjointe de dukkha avec la vie. Il n'est pas juste de traduire dukkha par souffrance.A l'instar de nombreux auteurs, j'ai toujours préféré conserver tel quel ce terme de « dukkha ». Il n'est pas non plus juste de traduire dukkha par toute une déclinaison de la souffrance dans les domaines physiques, fonctionnels, émotionnels affectifs. Non, on peut simplement reconnaître que ce qui rend dukkha plus évident c'est la souffrance, mais que la souffrance n'est que le symptôme de dukkha, et qu'elle n'est que la manifestation finale d'un processus.

Si l'on veut bien observer attentivement l'énoncé des quatre nobles vérités, fondement du premier discours du bouddha historique et seule base commune de tous les courants du bouddhisme, on y retrouve quatre fois la notion de dukkha :

1 – il y a dukkha
2 – l'attachement est la cause de dukkha
3 – quand l'attachement cesse, alors cesse dukkha
4 – voici le chemin qui conduit à la cessation de dukkha

La notion de dukkha est centrale dans le bouddhisme et la parfaite compréhension de dukkha est fondamentale pour la pleine compréhension du bouddhisme. C'est pourquoi le seul mot de souffrance ne doit pas et en peut pas être retenu comme seule traduction du mot dukkha. Rater la juste compréhension de dukkha, c'est à mon avis, manquer complètement la compréhension du bouddhisme dans son entier.

Une autre façon d'approcher la notion de dukkha est également de regarder son étymologie. Le mot a très certainement une origine sanskrite et a ensuite été traduit en pali. En tout état de cause, en sanskrit, dukkha s'écrit duakha et est composé de deux éléments, le premier est un préfixe (il n'est donc pas étonnant de voir ce mot ensuite être appliqué ou applicable à de nombreuses situations) « du » qui veut dire « incorrect », « impropre », « mal » et de la racine « stha » qui veut dire « emplacement », « établissement ». Ainsi la traduction en français que l'on pourrait retenir parmi d'autres pourrait être « incorrectement établi » qui reflète l'idée de quelque chose qui advient, qui s'installe, qui s'impose, et qui bouleverse ce qui était établi.

Avant de poursuivre sur l'exposé de dukkha et de détailler les exemples qui manifestent les différentes formes de dukkha tels qu'ils sont présentés dans le discours du bouddha historique, voici comment les commentateurs et les érudits bouddhistes distinguent les différentes variantes de dukkha. Il ne s'agit pas ici d'expliquer ou de désigner un phénomène qui conduit à dukkha ou qui est la manifestation de dukkha, il s'agit simplement de ranger les différentes manifestations de dukkha dans des catégories distinctes.

Dukkha peut être décomposé en sept catégories :

1 – Dukkha dukkha
2 – Viparinâma dukkha
3 – Sankhara dukkha
4 – Paticchanna dukkha
5 – Atpaticchanna dukkha
6 – Pariyâya dukkha
7 – Nippariyâya dukkha


1 – Dukkha dukkha

Dukkha dukkha, c'est la dimension première de la souffrance physique ou mentale.

Ce sont les douleurs physiques, les maux affectant les différentes parties du corps, ce sont les dysfonctionnements physiologiques, les maladies, les traumatismes, les handicaps, les difficultés fonctionnelles …

Ce sont également tous les états mentaux pathogènes, la tristesse, la peine, la mélancolie, la torpeur, l'inquiétude, le désespoir, l'angoisse, la détresse, le mal être, la solitude …

Tout cela est dukkha et correspond à ce qui est généralement signifié par le mot « souffrance ».

Tout un chacun a pu éprouver ces sensations désagréables et on ne rencontre personne qui n'y soit pas assujetti.


2 – Viparinâma dukkha

Viparinâma dukkha pourrait être traduit par dukkha dû au changement. Cette forme intéresse tous les états plaisants de satisfaction physique et mentale, où le sujet se sent bien et jouit pleinement de ses sens. Il apparaît tout naturellement que cette plénitude sensorielle et affective est perpétuellement recherchée. Mais il intervient toujours des circonstances qui font que ce plaisir est interrompu, diminué, empêché, rendu difficile ou impossible. Il en résulte un sentiment de perte de cet état, extrêmement frustrant, douloureux, déstabilisant. C'est ce changement qui se tient toujours à l'horizon de cette plénitude qui est dukkha.

Alors que beaucoup estiment que ces circonstances sont imprévisibles, soudaines, accidentelles, le bouddhisme considère qu'il est dans la nature même de cette pleine satisfaction ne pas durer, de s'arrêter, de se dissiper. Bref, c'est cette plénitude même qui est dukkha.

Le sujet connaît de telles situations tout au long de sa vie. Depuis la naissance, où il quitte l'univers utérin, puis au moment du sevrage, puis quand la mère réduit et suspend son omniprésence charnelle, toutes ces situations sont marquées par un changement souvent brutal. Les ages successifs depuis l'enfance, l'adolescence jusqu'à l'âge adulte sont semés d'événements de cette nature.

Tout cela est dukkha dû au changement.


3 – Sankhara dukkha

Pour poursuivre sur cet exposé de dukkha après la souffrance pure (dukkha dukkha) et après le plaisir exposé au changement (viparinâma dukkha), on pourrait penser comme le suggère ailleurs le bouddhisme qu'une attitude d'indifférence au plaisir en lui-même pourrait permettre de se prémunir de dukkha.

Ainsi, pourrait-on penser, l'équanimité, c'est-à-dire le fait de ne ressentir ni plaisir, ni déplaisir des sensations qui sont vécues, pourrait permettre de se soustraire de dukkha.

Il n'en est rien, l'équanimité qui certes, réduit considérablement la possibilité de dukkha, est aussi dukkha, car elle est aussi fragile, limitée, bref impermanente.

Ce qui est dukkha ici, c'est l'effort nécessaire pour accéder et pour maintenir cet état d'équanimité. Ce qui est dukkha, c'est que cet état répond à l'existence de certaines conditions qui lorsque qu'elles ne sont pas réunies font disparaître cet état. Tous ces états, toutes ces formations mentales, toutes ces perceptions sont conditionnées, et en tant que telles sont dukkha.

Le bouddhisme postule que « tous les états conditionnés sont dukkha ».


4 – Paticchanna dukkha

Littéralement paticchanna dukkha signifie douleurs cachées ou dissimulées. C'est le propre des problèmes de santé douloureux mais non visibles, c'est le propre des états mentaux perturbés qui nous affectent sans que rien n'y puisse paraître à l'extérieur.

Cette forme de dukkha, qui n'est pas évidente, pas visible, pas apparente, est aussi appelée apataka dukkha (dukkha non apparente).


5 – Atpaticchanna dukkha

A l'inverse, toutes les blessures corporelles apparentes ( les plaies, les bosses, les hématomes etc…), qui ne sont pas liées à la nature intrinsèque du corps ou de l'organe mental, mais qui ont des causes externes, sont appelées atpaticchanna dukkha ou bien dukkha exposé. On peut également les désigner comme pakata dukkha c'est-à-dire dukkha évidente.


6 – Pariyâya dukkha

Il s'agit ici de dukkha en devenir. Toutes les perceptions ou formations mentales, toutes les orientations qui ne sont pas immédiatement dukkha, mais peuvent conduire à une situation où dukkha va nécessairement se présenter sont désignées comme pariyâya dukkha.


7 – Nippariyâya dukkha

Littéralement nippariyâya dukkha signifie dukkha directe. Il s'agit de cette forme de dukkha intrinsèque et consubstantielle qui apparaît et réapparaît de la même manière et en fonction des mêmes circonstances. C'est le dukkha qui advient présentement et inévitablement.

Cette forme de dukkha directe ou dukkha intrinsèque vient en contre point de la forme de dukkha précédente qu'on pourrait appeler « dukkha à retardement » ou « dukkha indirecte ».

[Nota : certains auteurs ont rassemblé ces sept catégories en trois groupes.]



Pour mieux comprendre ce caractère bien spécifique de la notion de dukkha et la place fondamentale dans la pensée bouddhique, il convient de revenir aux déclarations du bouddha historique lui-même.

Voilà ce que dit le bouddha historique dans le Dhamma Cakkappavattana Sutta : « Voici, ô bikkhus, la noble vérité sur dukkha. La naissance est dukkha, la vieillesse est dukkha, la maladie est dukkha, la mort est dukkha, l'union avec ce que nous haïssons est dukkha, la séparation d'avec ce que nous aimons est dukkha, ne pas obtenir ce que nous désirons est dukkha, en résumé les cinq agrégats d'attachement sont dukkha ».

Le bouddha historique expose et décompose de manière simple des différentes composantes de dukkha. Il démontre dukkha en désignant toutes les situations où se rencontre dukkha. Ainsi dukkha est :

1 – la naissance,
2 – la vieillesse,
3 – la maladie,
4 – la mort,
5 – l'union avec ce qui est haï,
6 – la séparation d'avec ce qui est aimé,
7 – la non-obtentionn de ce qui est désiré,
8 – les cinq agrégats.


1 – la naissance ~ jâti dukkha ~

Il ne faut pas comprendre la naissance uniquement comme le fait de naître physiquement. Il est vrai que pour les bouddhistes et pour de nombreux orientaux, ce n'est pas la mort qui est inexorable, c'est la naissance. En effet, il n'y a pas de mort sans naissance préalable. Il n'est pas étonnant de la trouver en tête de liste.

La naissance, c'est la renaissance. La naissance, c'est surtout le fait de revenir vers une situation de non maîtrise des choses ou de non contrôle des choses (émotions, sentiments, attachement aux personnes, aux objets, aux perceptions, aux formations mentales …). C'est ce point de départ qui inaugure l'engrenage qui conduit tôt ou tard à dukkha. C'est en tant que tel que « la naissance » est dukkha.

La naissance, c'est aussi la volonté, l'acharnement, l'attachement à la continuation, à perpétuation, à l'ininterruption, au renouvellement des choses, du plaisir des sens … C'est cette volonté, cet acharnement, cette lutte pour revenir qui est dukkha.



2 – la vieillesse ~ jarâ dukkha ~

Il ne faut pas associer d'une manière arbitraire la vieillesse et dukkha. Ce qui est dukkha dans la vieillesse, ce peut être bien sûr l'affaiblissement physique et psychique dû à l'age, mais de ce point de vue, chaque individu ne vieillit pas de la même façon. Ce peut être également la diminution des facultés mentales ou physiques, la perte progressive de jouissance sensorielle, qu'elle soit sensuelle ou existentielle, mais là encore chaque individu se positionne différemment par rapport à ces changements. Ce qui est dukkha dans la vieillesse, c'est le caractère incertain, fragile, changeant, fugace, du vivant, des sensations, des sentiments, des attachements. C'est cela que le vieillissement révèle à chaque instant invariablement, imperturbablement, inexorablement.



3 – la maladie ~ dukkha dukkha ~

Ici encore, il ne faut pas limiter dukkha à la simple dimension de la douleur qu'occasionne la maladie. De plus, de nombreuses affections ne sont pas douloureuses ce qui est d'ailleurs la raison de leur non-détection.

De la même manière, la maladie est dukkha car elle prive abruptement le sujet de tout ou partie de ses moyens. Le caractère incertain, changeant et défaillant du vivant apparaît d'une façon plus brutale, voire contraire même au sens du vivant. C'est également le caractère relatif de nos certitudes sur notre propre corps qui sont mises en échec, ce que ne croyons être sain, en bon état de fonctionnement ne l'est peut-être pas.



4 – la mort ~ marana dukkha ~

Naturellement, la mort est dukkha, comme la vieillesse et la maladie cela se comprend aisément. Là encore, il ne s'agit pas de se focaliser sur le seul fait de la mort. D'ailleurs les bouddhistes s'inscrivent dans une philosophie plus globale qui considère que la vie commence avant la naissance et ne s'achève pas après la mort. Les bouddhistes partagent avec l'indouisme et de nombreux courants d'Asie, l'idée que la mort en tant que telle n'est pas la véritable fin. La mort n'est pas dukkha en tant qu'émotion ou en tant que peur, mais simplement en tant que stade ultime d'une vie, mais pas « fin » ultime (celle-ci étant le parinibbana).

La mort, c'est la désagrégation des cinq agrégats qui achève ce processus décomposé dans ses étapes précédentes, soit après la naissance, la vieillesse et la maladie.

Avec la mort, ce qui est mis en relief c'est le caractère transitoire et passager de la vie par elle-même.



5 – l'union avec ce qui est haï ~ appiyehi sampayoga dukkha ~

Etre associé avec ce que l'on n'aime pas, au-delà de l'aspect insatisfaisant, déplaisant, désagréable et même stressant que cela peut avoir, met en relief le caractère extrêmement limité de notre système de valeurs, qui ne vaut que pour autant qu'il est partagé.

L'absence de souci de l'autre, l'individualisme, le manque de solidarité, l'arrivisme, la cupidité, la médisance …sont autant d'attitudes que nous rencontrons dans nos milieux professionnels, dans nos voisinages résidentiels, et autres. Ces attitudes sont naturellement autant d'obstacles à un développement personnel harmonieux dont chacun souhaite se détourner. Ces situations sont d'autant plus insoutenables qu'on ne peut pas toujours s'en soustraire.

Il est naturel que tout un chacun cherche à se rapprocher de ce qu'il aime et à se détourner de ce qu'il hait, mais la réalité de la société peut rendre cette inclination naturelle difficilement réalisable.

Ce qui est dukkha c'est cette inadéquation de nos valeurs à celles de certains autres, c'est l'impossibilité de cohésion avec certains systèmes ou certaines organisations, c'est cet obstacle interposé à soi même dans nos relations au monde et aux autres.



6 – la séparation d'avec ce qui est aimé ~ piyehi vippayoga dukkha ~

La perte, l'absence, le manque, l'éloignement c'est aussi dukkha. Ici dukkha, renvoie à des sentiments qui se situent en dehors de la perception sensorielle. Ces situations illustrent là encore la fragilité de nos constructions, en particulier quand elles impliquent nos relations avec les autres.

Clairement, c'est l'attachement aux personnes ou aux choses qui est dukkha.

On voit bien ici, que dukkha n'est pas seulement ce qui est négatif. En fait, l'affection, l'amour, l'attachement à l'autre, le plaisir, la satisfaction, le contentement, tout cela est aussi dukkha. C'est dukkha, non pas directement, mais parce que ces situations sont temporaires, qu'elles ne durent pas, que tôt ou tard une séparation aura lieu et que tous ces sentiments se dissiperont en générant de l'inquiétude, de l'émotion, de l'affliction ...



7 – la non-obtention de ce qui est désiré ~ icchitalâbha dukkha ~

Il est évident pour tout un chacun que nous sommes perpétuellement à la recherche de l'obtention de tel ou tel objet de consommation, de telle ou telle marque ostentatoire de statut social (une belle voiture, un appartement dans un bon quartier …), de la compagnie de telle ou telle personne (un beau garçon ou une belle fille). Il est également évident que cette volonté effrénée d'appropriation ne se traduit pas toujours par des résultats positifs et que les déceptions sont nombreuses. Il faut pouvoir se satisfaire d'autre chose, mais souvent le besoin ressurgit, et la volonté d'appropriation se renouvelle.

Ce qui est dukkha ce n'est pas seulement le fait de n'avoir pas obtenu ce que l'on désirait, mais c'est cet acharnement irrépressible à vouloir obtenir, à s'approprier, à s'accaparer, à vouloir pour soi, à vouloir à soi seul toutes ces choses.

En général, le contentement de la jouissance des objets que nous possédons ou des biens que nous nous sommes procurés est très éphémère et tout un chacun une fois qu'il a obtenu ce qu'il voulait, délaisse ce qu'il vient d'obtenir pour porter son dévolu sur un nouvel objet. Cette insatisfaction récurrente, qui pousse à vouloir toujours plus, advient parce qu'il est évident qu'une fois que les objets désirés ont été obtenus, ils n'apportent ni une satisfaction durable, ni un meilleur être, ni la résolution des difficultés du quotidien, ni le bonheur.

Ce qui est dukkha, c'est cette illusion de la satisfaction qui ne dure pas, qui s'efface rapidement, qui rend vains les efforts déployés, qui relativise les motivations de ces efforts et qui conduit à une nouvelle démarche d'appropriation vers un nouvel objet. Un cycle sans fin s'enclenche et se ré-enclenche à chaque fois et une renaissance vers une nouvelle envie s'enclenche une fois la précédente satisfaite.



8 – les cinq agrégats ~ pañcupâdânakkhandhâ dukkha ~

Rappelons que les cinq agrégats sont ce qui caractérisent tout être vivant, à savoir :

1 – les formes matérielles
2 – les sensations
3 – les perceptions
4 – les formations mentales (les représentations mentales)
5 – la conscience

Les cinq agrégats sont des agrégats d'attachement parce que le sujet a toujours tendance à considérer que chacun de ces éléments lui appartiennent, sont siens, sont stables, durables, sans fin.

Tout être vivant à tendance à croire que cette forme physique, cet ensemble d'éléments matériels est le moi, est solide, persistant, durable, mais la simple observation attentive de la réalité démontre que ceci est une illusion.

Tout être vivant à tendance à croire que les sensations sont lui, sont à lui, sont le moi, sont inaltérables, sont durables, mais, la simple observation démontre le contraire.

Tout être vivant à tendance à croire que les perceptions sont le moi, sont durables, mais, là encore, la simple observation démontre que ce n'est pas le cas.

Tout être vivant à tendance à considérer que les formations mentales fabriquées à partir de ces trois agrégats et par l'organe mental sont le vrai moi, celui là même qui est permanent, inaliénable, stable, inscrit dans la durée, mais, encore une fois, la simple observation démontre que cela n'est qu'une chimère.

Tout être vivant à tendance à croire que la conscience qu'il élabore de connaître et de savoir à partir des données du corps, des sensations, des perceptions et des formations mentales est le « Moi », est le « Je », est le point où réside cette personnalité inattaquable, inviolable, sans fin, sans limite … , mais, sur cet agrégat comme sur les autres, il n'y a que variation, que changement, que transformation, qu'incertitude, que dissipation, que disparition.

A chaque processus de perception, qu'il s'agisse de voir (1er agrégat : éléments matériels formant ce qui deviendra l'image, 2ème agrégat : contacts visuels entre l'œil et la chose vue, 3ème agrégat : image perçue, intellection, 4ème agrégat : interprétation de l'image perçue, 5ème agrégat : conscience que l'image perçue s'inscrit dans tout un ensemble de significations), de sentir, d'entendre, de toucher, de goûter ou de comprendre, à chacun de ces processus, à chacune de ces étapes de ces processus, le sujet a toujours tendance à s'abandonner à ces données. Il y a l'appropriation de ces processus, il y a le caractère agréable, neutre ou désagréable qui y sont associés et toutes les tentatives qui sont développées soit pour renouveler ces plaisirs, soit pour éviter ces déplaisirs, il y a l'attachement à ces données et l'effort pour s'en souvenir, pour se remémorer les moyens de les retrouver. Tous ces aspects sont illusoires, transitoires, impermanents. Tous ces aspects sont dukkha.

En résumé, les cinq agrégats sont dukkha :

– les formes matérielles sont dukkha,
– les sensations sont dukkha,
– les perceptions sont dukkha,
– les formations mentales (les représentations mentales) sont dukkha,
– la conscience est dukkha.

Dans toute son expérience, dans toutes ses recherches, au cours de sa très longue investigation sur le monde, dans toutes ses méditations, tout au long de sa retraite, le bouddha historique n'a vu que le changement, que toutes choses étaient soumises au changement. Tout n'est que naissance, croissance, altération, décroissance, dépérissement, mort, disparition, dispersion.

Il peut paraître vain, compte tenu de l'exposé qui est développé ci-dessus, de continuer à vouloir mettre une traduction en face du mot dukkha, la seule solution est bien de lister un catalogue de propositions. Ainsi dukkha renvoie à :
- insatisfaction, frustration, non-contenttement, déplaisir, non plaisir,
- échec, imperfection, inachèvement, inconfort,
- attente, ennui, inquiétude, crainnte, angoisse, mal être, trouble,
- atténuation, altération, ddéperdition, dépérissement,
- inadéquation, vacance, manque, viide,
- fin, interruption, disparition, mort, déception, tristesse, mélaancolie, dépression, vague à l'âme,
- énervement, colère, impulssivité, mécontentement, conflit, incompatibilité,
- maladie, douleur, peine, affection, trouuble, malaise, souffrance.


Dernière édition par tiboug le Jeu 08 Fév, 2007 9:59; édité 1 fois
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé MSN Messenger
cgigi2
Invité





MessagePosté le: Mer 07 Fév, 2007 17:35    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour tiboug, ça fait longtemps, contente de te relire Very Happy merci pour cet exposé détaillé de dukkha Smile

avec metta
gigi

Revenir en haut de page
tiboug



Inscrit le: 10 Jan 2007
Messages: 2

MessagePosté le: Jeu 08 Fév, 2007 10:10    Sujet du message: Répondre en citant

De rien, je trouve que c'est un texte très bien écrit, explicite, accessible et essentiel ...
Souvent pour les personnes - cela dépend de l'expérience de chacun- qui approchent le bouddhisme ou se questionne sur ces principaux concepts, se trouvent choqués, interloqués par le mot réducteur et communément utilisé "souffrance" pour rendre Dukkha, pour expliciter la voie du Bouddha.
Forcément ils vont argumenter en disant que tous n'est pas "souffrance", qu'il y a des plaisirs dans la vie, qu'il y a des moments de bonheur, que le bouddhisme est pessimiste, ect ...
L'acceptation générale du mot souffrance, est douleur physique ou mentale, mais comme cela est très bien explicité plus haut, Dukkha c'est aussi Sukkha (plaisirs sensoriels) un peu comme les deux faces d'une même pièce :
Pile Sukkha, Face Dukkha ...
Alors forcément une traduction de la première noble vérité "Tout n'est que souffrance", est selon moi "grossière" et du fait de l'acceptation de ce mot, est mal comprise.
Alors que Dukkha, dans toute l'étendue de ses nuances est une expérience que tout être sensible et conscient fait l'expérience inévitablement, tout au long de sa vie ...


Avec Metta Tiboug
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé MSN Messenger
tirru...



Inscrit le: 02 Aoû 2006
Messages: 424

MessagePosté le: Jeu 08 Fév, 2007 10:55    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour Tiboug,

Le retour vers les connaissances de base est une démarche indispensable, elle a la mérite de confronter notre expérience à la théorie et vis versa. Nous redécouvrons des choses simples que nous avons oublié et permettons ainsi à la flamme du Dhamma de se raviver.

Beaucoups le disent, la doctrine de dukkha qui est la première noble vérité n'est pas si facile à comprendre et à connaitre. Au dela d'une compréhension née d'une simple lecture il y a la connaissance vécue, qui se vit dans la chair, les sensations physiques et mentales, c'est ce rapport intime avec dukkha. Dukkha commande presque tout. Elle oblige à s'appuyer sur sukkha. Elle est l'ennemie amie, sukkha l'amie ennemie, comme se plait à la dire le Vén. Uttara Nyana. Dukkha est le lot de chacun, et chacun son dukkha. Nous pourrions creuser des heures durant dans ce fond insondable que constitue dukkha.

Comment situer dukkha au milieu des quatre nobles vérités ?

Les quatre nobles vérités peuvent être vues comme les quatre moments d'un acte médical: constat de la maladie, origine de la maladie, prévision de la maladie, application du traitement... Cet acte médical, cette thérapie psychosomatique c'est Bouddha appelé aussi le "Grand médecin" qui nous l'a enseigné à travers le Dhamma...

Citation:
-1 ére Noble Vérité: Diagnostic : La vie est Dukkha (souffrance, malheur, peine, misère, imperfection, conflit, non-substantialité etc...)

-2 éme Noble Vérité : Etiologie : Le désir est l'origine de Dukkha...la soif (tanha : qui produit la ré-existence et le re-devenir qui est lié à une avidité passionné et qui trouve une nouvelle jouissance tantôt ici, tantôt là, c'est la soif des plaisirs des sens (kama-tanha), la soif de l'existence (bhava tanha) et la soif de la non-existence (vibhava-tanha

-3 éme Noble Vérité : Pronostic : La cessation de tanha, de la soif, la délaisser, y renoncer, s'en libérer, s'en débarasser... cessation complète de la soif ... et du malheur... de dukkha ...

-4 éme Noble Vérité : Thérapie : Le sentier conduisant à la cessation de dukkha (duhkha-nirodha-gâmini) : c'est le Noble Sentier Octuple à savoir
:




Citation:
Ce qu'on appelle le chemin octuple est l'ensemble des huit éléments qui constituent la perfection à tous les niveaux. On peut dire que c'est la définition de la note mentale, c'est-à-dire l'acte minime consistant à appliquer son attention sur un objet. Dès lors qu'il y a note mentale, ces huit éléments sont automatiquement réunis, et aussitôt que ces huit éléments sont au complet, il y a par conséquent note mentale.

Nobles sont les êtres qui suivent cette voie, car elle est la voie juste, la seule qui conduit à la cessation définitive de toute forme d'insatisfaction. Voici en résumé, les huit pas qui composent le chemin octuple :

1er pas : La compréhension juste.

Avoir une bonne compréhension des quatre nobles vérités, des trois caractéristiques de l'univers, que l'on nomme anicca : le caractère non permanent des choses, dukkha : le caractère insatisfaisant des choses, et anatta : le caractère dépourvu d'existence propre des choses.

2e pas : La pensée juste.


C'est avoir une pensée libre de jalousie, de mauvais vouloir, et de cruauté.

3e pas : La parole juste.

S'abstenir de mensonges, de médisances, d'un langage grossier et s'abstenir de paroles futiles.

4e pas : L'action juste.

Ne pas tuer, ne pas blesser, ne pas voler, ne pas avoir de méconduite sexuelle.

5e pas : Le moyen d'existence juste.

Gagner sa vie de manière digne en restant totalement honnête et en évitant d'exercer le trafic d'armes, d'êtres vivants ou de chair, ainsi que la vente de poison, de drogues ou de boissons enivrantes.

6e pas : L'effort juste.


L'effort de surmonter ce qui est défavorable, l'effort d'éviter ce qui est défavorable, l'effort de développer ce qui est favorable, et l'effort de maintenir ce qui est favorable.

7e pas : L'attention juste.

La contemplation du corps, des sentiments, de l'esprit, et des phénomènes.

8e pas : La concentration juste.

C'est la fixation de l'esprit sur un seul objet.

Ainsi, il n'y a pas d'acte plus juste, plus honorable et plus bénéfique que la note mentale.

Source : http://www.dhammadana.org/dhamma/pratique/liberation.htm
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
viriya
Web


Inscrit le: 27 Juil 2006
Messages: 601
Localisation: idf

MessagePosté le: Jeu 08 Fév, 2007 22:43    Sujet du message: Répondre en citant

merci pour ces rappels

Concernant l'origine de Dukkha, dans la pratique , le Bouddha a détaillé les 3 racines du mal qui sont :

    1/ lobha (désir, possession, attachement, avidité, soif,... ce qui ramène à soi, attire à soi, à moi - force d'attraction )
    2/ dosa (aversion, colère,haine,jalousie, pleurs, peur.., ce qui repousse loin de soi, .. force de répulsion )
    3/ moha (ignorance, illusion, torpeur, paresse, doute... )


Le Bouddha nous conseille de bien les identifier. Plus on est conscient de leur présence, plus on affaiblit leur influence sur nous. C'est la condition pour faire naitre les états saints qui à leur tour vont préparer les conditions pour qu'on se rapproche de la Cessation de Dukkha.

Les différentes facettes ou manifestations de ces trois racines du mal ne sont pas nombreuses. Elles sont peu nombreuses, elles ne sont qu'au nombre de 12 mais qui polluent notre vie, qui font tourner follement le monde, qui déclenchent des guerres, des destructions.

Ce sont les 12 cittas malsains décrits clairement par l'Abhidhamma dans ce post : http://forumetta.free.fr/viewtopic.php?t=145

Le monde est gouverné par ces 12 cittas malsains.

Le problème est que nous sommes tellement habitués avec ces 12 cittas malsains ou ces trois racines du mal que nous ne voyons pas les ravages qu'elles provoquent en nous. Heureusement, nous sommes aujourd'hui au contact du Dhamma d'un SammaSambuddha qui nous enseigne comment les voir, les identifier, comment sortir définitivement de leur emprise.

Dans ce contexte, les préceptes nous fournissent un excellent mémo de rappel , qui agissent comme un frein nous permettant d'avoir le temps d'apercevoir le fonctionnement des 3 racines du mal. Oh certes, la première fois, ça ne s'arrête pas tout de suite, mais avec patience, persévérance, on recommence et recommence appliquant le formule de l'attention et on y arrivera.

Le bonheur de voir où est le vrai chemin de la liberté est alors inestimable.
_________________
avec metta
viriya
Revenir en haut de page
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
Montrer les messages depuis:   
Ce forum est verrouillé; vous ne pouvez pas poster, ni répondre, ni éditer les sujets.   Ce sujet est verrouillé; vous ne pouvez pas éditer les messages ou faire de réponses.    Forum Mettâ Index du Forum -> Documentation Toutes les heures sont au format GMT + 2 Heures
Page 1 sur 1

 
Sauter vers:  
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas voter dans les sondages de ce forum




Forum
phpBB © 2001, 2005 phpBB Group
Traduction par : phpBB-fr.com