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Originalité ou universalité de la doctrine de dukkha ?

 
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Chaosophe



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MessagePosté le: Jeu 02 Oct, 2008 14:07    Sujet du message: Originalité ou universalité de la doctrine de dukkha ? Répondre en citant

Bonjour à tous !

La découverte de dukkha est-elle le fait du seul Bouddha ? Ou la conscience du tourment vital s’est-elle déjà rencontrée chez d’autres grands esprits ? La question est ardue, car même si la souffrance est un vécu universel, il n’est pas évident que ce que nous expérimentons alors soit précisément ce qu’entendait le Bouddha par le terme « dukkha ». Car au sens le plus profond, dukkha est une caractéristique propre à tout état conditionné. Il servirait pourtant sans doute la cause du bouddhisme, et précisément la thèse de l’universalité de la douleur, de montrer que nombre de grands esprits ont pris conscience des aspects subtils de la souffrance, comme l’interdépendance plaisir/peine, ou l’insatisfaction chronique de l’homme. C'est à ce petit jeu que je vous invite à jouer. N’hésitez donc pas à poster ici d’autres textes à l’appui à la thèse bouddhiste.

Dukkha dans L’Epopée de Gilgamesh (le plus ancien livre de l’humanité !) : « Pourquoi rôdes-tu Gilgamesh ? La vie-sans-fin que tu recherches, tu ne la trouveras pas. Lorsque les dieux ont créé les hommes, ils ont gardé la vie entre leurs mains. Toi, plutôt, remplis-toi la panse ; demeure en gaieté jour et nuit. (...) Accoutre-toi d'habits propres ; lave-toi ; baigne-toi ; regarde tendrement le petit qui te tient par la main et fais le bonheur de la femme serrée contre toi. Car telle est l'unique perspective des hommes ! ». - Dukkha est ici le fait que l'éternité est inacessible à l'homme, et que celui-ci est condamné aux seuls plaisirs mondains.

Dukkha chez les Grecs :

Chez Homère : « Ils ne servent de rien, les gémissements qui nous glacent. Tel est le destin filé par les dieux aux mortels misérables : vivre affligés. Eux seuls n'ont point de souci. Il y a, sur le seuil du palais de Zeus, deux jarres de tous les dons qu'il nous donne, l'une de maux, l'autre de biens. L'homme à qui c'est un mélange que donne Zeus foudroyant, tantôt rencontre un mal, tantôt un avantage ; l'homme à qui il donne des misères, il en fait un objet d'outrage. Celui-là, une faim canine le pousse sur la terre divine ; il va çà et là, sans être honoré des dieux ni des hommes. (L’Iliade, XXIV, 500).

Chez Anaxagore : « De tous ceux qu'on tient pour heureux, il n'y en a pas un qui le soit ».

Chez Sophocle : « De sort affranchi des douleurs, jamais le roi tout-puissant, le fils de Cronos lui-même n’en assigne aux mortels ; mais la joie et la peine alternent pour chacun » (Les Trachiniennes, Chant du Chœur, 114-160)

Dukkha dans la Maitry Upanisad : « Je suis dans ce flot perpétuel comme une grenouille dans un puits sans eau » (Chant du roi Brhadratha, 1.2-4).

Dukkha dans la Bible : « N'est-ce pas un temps de corvée que le mortel vit sur terre, et comme jours de saisonnier que passent ses jours ? » (Job, VII, 1)

Dukkha chez Philon d’Alexandrie : « L’être à qui manque la sagesse [...] se courbe devant les souffrances » (Legum allegoriae, § 200-202). « Où se produit le plaisir, là aussi se produit la souffrance. Or, nous ressentons du plaisir par la sensation, de sorte que nous souffrons aussi par elle. [...] Chez l’insensé, ce qu’il éprouve devient excessif, parce qu’il n’a dans l’âme aucun remède pour se défendre des dangers mortels qui viennent des sensations et des choses sensibles » (Legum allegoriae, § 200-202). « La race humaine en effet est soumise au chagrin, à la crainte [...] si bien qu’elle est agitée par des désagréments immédiats, ou agitée de peur et de crainte » (De Abrahamo, § 200-207).

Dukkha chez Pascal : « Les hommesn’ayant pu guérir la mort, la misère, l’ignorance, ils se sont avisés, pour se rendre heureux, de n’y point penser » (Pensées, 133 : « Divertissement »). La condition de l’homme est « inconstance, ennui, inquiétude » (Frg. 24). Inconstance : les hommes changent sans arrêt d’objet . Ennui : aucun objet n’est satisfaisant ; on s’en lasse, on cherche à se divertir. Inquiétude : l’homme est mortel et ignore son origine et sa destinée.

Dukkha chez Locke : l’uneasiness, i.e. l’état d’un homme qui n’est pas à son aise, le manque d’aise et de tranquillité dans l’âme. On peut traduire uneasiness par « Inquiétude » (Malebranche), mésaise (Montaigne), absence de contentement ou de tranquillité, mal-être, intranquillité. C'est fondamentalement le malaise, la douleur comme idée simple. L’uneasiness est présent dans presque toute idée. Elle est liée au plaisir, et peut en provenir (en cas d’excès de plaisir. Dukkha rend actif (ch. 7, § 4) : son utilité est d’être un avertissement contre le danger et les agressions. C'est ainsi l’aiguillon de l’humanité. C'est la cause de tout changement d’état (II, 21, 29) : « le motif qui incite à changer, c’est toujours quelque inquiétude, rien ne nous portant à changer d’état, ou à quelque nouvelle action, que quelque inquiétude (uneasiness). C’est le motif déterminant de la volonté ». Une petite brulure est pour Locke supérieure aux plus grands plaisirs. L’Uneasiness qu’un homme ressent en lui-même pour l’absence d’une chose qui lui donnerait du plaisir si elle était présente, c’est ce qu’on nomme Désir, lequel est plus ou moins grand, selon que cette uneasiness est plus ou moins ardente.

Dukkha chez Kant : le bonheur (ici-bas) « se révèle forcément, comme on le sait, assez kümmerlich », i.e. misérable, pauvre, chagrinant. C'est pourquoi la vie empirique n'a évidemment « aucune valeur » (CRPr, V, 126).

Dukkha chez Hegel : « La douleur n’est présente que dans l’opposition à l’égard d’un devoir-être, d’un affirmatif ; ce qui n’est plus un affirmatif en lui-même n’a pas non plus de contradiction, pas de douleur. Est douleur précisément la négativité dans l’affirmatif, le fait que cet affirmatif est en soi-même ce qui se contredit, ce qui est blessé [...] Cette douleur et cette conscience sont la condition de l’approfondissement de l’homme en lui-même » (Leçons sur la philosophie de la religion, PUF ? 2004, p. 223.)

Dukkha chez Schopenhauer : « La souffrance est le fond de toute vie » (Le Monde, IV, 56, et passim).

Dukkha chez Dostoïevski (le « sous-sol » dont il s’agit représente en somme l’existence solitaire du libre penseur) : « je sais moi-même, comme deux et deux, que ce n’est pas le sous-sol qui est mieux, c’est quelque chose d’autre, quelque chose qui n’a rien à voir, et que je cherche tellement, et que je ne trouverai jamais ! Au diable le sous-sol ! » (Carnets du sous-sol, trad. André MARKOWICZ, Actes Sud, 1992, p. 53).

Dukkha chez Nietzsche : « Et si plaisir et déplaisir étaient liés par un lien tel que celui qui veut avoir le plus possible de l’un doive aussi avoir le plus possible de l’autre… » (Gai Savoir, L I, § 12). La Naissance de la tragédie situe la souffrance dans le fond originaire même de la réalité : Nietzsche aurait-il reconnu saṃskhāra-dukkha ?

Dukkha chez Baudelaire : « Celui qui s’attache au plaisir, c’est-à-dire au présent, me fait l’effet d’un homme roulant sur une pente et qui voulant se raccrocher aux arbustes, les arracherait et emporterait dans sa chute. Avant tout, Etre un grand homme et un Saint pour soi-même » (Mon cœur mis à nu, O. C., I, p. 691).
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